La télomérase intéresse de plus en plus les chercheurs car elle pourrait recéler les secrets contre le cancer, voire ceux de la vie éternelle.
La télomérase est une enzyme. Plus précisément, elle fait partie de la famille des ribonucléoprotéides (assemblage d’ARN et de protéines). Elle permet de conserver la longueur des chromosomes.
Ceux-ci subissent lors de la réplication une perte à leur extrémité dans une région appelée télomère. Il s’agit d’une région très répétitive (répétition d’environ 2000 fois la séquence 5’TTAGGG3’) et non codante, qui permet entre autre l’appariement des chromosomes homologues durant la prophase de la première division de la méiose. Or lors de chaque réplication, le système ne peut empêcher la perte d’environ 100 paires de bases à chaque mitose, ce qui entraine la disparition de l’ADN télomérique au bout de 125 divisions.
C’est là qu’intervient la télomérase. Elle fonctionne comme une transcriptase inverse de l’ADN, et va à partir de son ARN matrice (possédant une séquence AAUCCC) permettre la synthèse des séquences TTAGGG, et ainsi empêcher la perte de l’information télomérique.
Cette enzyme fut découverte par Carol Greider, Jack Szostack et Elisabeth Blackburn en 1985, dans une petite créature de rivière : tetrahymena thermophila (organisme unicellulaire de la famille des protozoaires cillés). Ils ont pour cela reçu le prix Nobel de médecine en 2009.
La télomérase: au service de l’immortalité des cellules
La télomérase étant une enzyme, elle possède des différences d’expression selon les cellules. Elle s’exprime peu dans les cellules somatiques, et la disparition des extrémités de l’ADN entraîne le «vieillissement» des cellules. Celles-ci perdant une partie de leur information deviennent non viables, et finissent par être supprimées après apoptose (mort cellulaire programmée, «suicide» d’une cellule). Le raccourcissement peut aussi être induit par des facteurs extérieurs comme le stress.
Or la télomérase est beaucoup plus synthétisée dans des cellules germinales ou dans certaines cellules cancéreuses. Celles-ci peuvent donc être considérées comme «immortelles».
Le lien entre la télomérase et l’immortalité fut aussi constaté lors du clonage du premier mammifère: Dolly. Les chercheurs se sont aperçu que ses cellules possédaient des signes de vieillesse prématurée et que ses télomères étaient plus courts que la normale. L’hypothèse d’une mémoire des cellules de la « mère » fut énoncée, celles-ci auraient gardé l’âge de la « mère ». Cependant d’autres clonages ont montré que des animaux clonés possèdent quant à eux des télomères plus longs, ce qui pourrait allonger leur durée de vie.
L’éthique et le manque de technologie n’ont pas permis d’aller plus loin dans cette recherche, mais l’effet de la télomérase peut s’avérer intéressant.
La télomérase: eau de jouvence ou épée de Damoclès?
La télomérase s’exprime beaucoup dans certaines cellules cancéreuses, les rendant immortelles et donc si mortelles pour l’homme puisqu’elle collabore à l’augmentation et au maintien de ces cellules. L’augmentation de son expression entraîne la prolifération incontrôlée des cellules qui finissent par former des tumeurs.
La télomérase offre donc de nombreuses voies d’études pour le traitement du cancer, de maladie dégénérative ou de transplantation. Pour le diabète par exemple, elle permet de cultiver en laboratoire des nombreuses cellules jeunes qui seront ensuite transplantées, mais qui peuvent impliquer le risque futur d’un cancer.
Contre le cancer, on pourrait penser à la mise en place de cellules qui lutteraient contre la télomérase et donc la prolifération des cellules (de nombreux cancers tels que le papillomavirus surexpriment la télomérase par des protéines virales). En effet, sans télomérase le cancer ne peut pas se développer. Cependant, cette enzyme est indispensable à de nombreuses cellules de notre organisme comme les cellules sanguines ou sexuelles. Sans la télomérase le patient risquerait d’être anémié ou de devenir stérile.
Mais cette voie n’est pas sans issue. En effet, la télomérase est une enzyme de la même famille que celle qui permet au VIH de pénétrer dans ses cellules cibles (transcriptase inverse), et il existe déjà des anti-transcriptases.
La télomérase: une voix à suivre pour la lutte contre le cancer
Ainsi, la télomérase pourrait bien être la fontaine de jouvence dans de nombreux rêves anthropiques d’immortalité. Mais à des fins plus concrètes, celle-ci peut être la clé dans la recherche pour la lutte contre le cancer.
Sources, références et livres :
– Michel Breuil: Dictionnaire des sciences de la vie et de la terre.
– GFME détaille le cancer et le VIH et les problèmes liés à l’utilisation de la télomérase.
– Dr Michael Fossel : Révolution anti-âge : Le secret de la télomérase
– Telomeres and Telomerase in Cancer (Cancer Drug Discovery and Development)
– Bio-Identical Hormones and Telomerase: The Nobel Prize-Winning Research into Human Life Extension and Health by Dr. Edmund Chein
– Telomeres and Telomerase: Methods and Protocols