Dans la fratrie, la naissance d’un bébé peut être source de tensions
Les jalousies entre frères et soeurs, entre ainés et cadets sont monnaie courante. Explications, et méthodes et astuces pour que le petit dernier soit bien intégré
L’arrivée d’un nouveau bébé au sein d’une fratrie peut poser différents problèmes aux ainés. L’ancien « petit dernier » perd sa place, l’ex enfant unique doit céder son statut… il peut être important de savoir comprendre et décoder ce qui se passe dans la tête de ses petits, pour que l’arrivée de bébé se passe dans les meilleures conditions !
Savoir détecter la jalousie entre frères et soeurs : faut-il intervenir ?
Lorsque l’enfant parait… si l’enfant est rêvé et fantasmé par la mère qui le porte pendant les neuf mois de grossesse, et que tout change au moment de la naissance pour elle, pour le père de l’enfant, devant cet être de chair et de sang différent d’eux, on peut imaginer le choc que représente l’arrivée d’un bébé dans la fratrie.
L’arrivée du petit dernier est en effet un bouleversement dans la fratrie, qui avait un ordre établi : le petit dernier doit s’insérer dans cet équilibre qui le précédait, où chacun avait un rôle bien défini. Virginia Satir, grande thérapeute de la cohésion familiale originaire des Etats Unis, nous a bien montré que dans une famille, chacun joue un rôle bien défini, qu’il existe des points de force et des lignes directrices comme dans un tableau, et que chaque élément a trouvé un équilibre par rapport aux autres. Elle nous montre comment en changeant un élément du « mobile familial » (elle emploie cette image pour comparer la place de chaque membre de la famille aux mobiles que l’on suspend au dessus du lit des bébés), c’est l’ensemble du mobile qui doit retrouver un nouvel équilibre. Et une arrivée, autant qu’un départ (décès, départ du nid familial d’un ainé…) va provoquer immanquablement une période de déséquilibre avant qu’un nouvel équilibre ne se crée, prenant en compte chaque membre de la famille.
La place de chacun dans la fratrie, un nouvel équilibre à trouver avec l’arrivée d’un bébé
Il ne s’agit donc pas pour les parents de s’inquiéter de ce déséquilibre passager, en revanche, il peut être important de parler avec les enfants plus âgés pour les rassurer sur leur place au sein de la fratrie. Chacun a sa place, aucun ne peut être remplacé. Dans un premier temps donc, cette « saine » jalousie peut aider les ainés à comprendre, avec l’aide des parents, qu’ils ont leur place à part entière dans la famille. Surtout, les parents peuvent comprendre que l’enfant jaloux de l’arrivée d’un petit n’est pas « méchant », ce qui l’étiquette dans ce rôle et renforce paradoxalement ses comportements jaloux. L’ainé n’est pas « méchant », mais il cherche sa place et doit lui aussi trouver un nouvel équilibre, et comme chacun de nous avec nos mécanismes de résistance au changement, il tente de ne pas bouger… ce qui est impossible car la famille dans son ensemble a évolué avec l’arrivée du petit dernier. Les parents peuvent donc prendre du temps avec l’ainé ou les ainés pour rassurer chacun sur sa place particulière.
Ce temps de l’arrivée d’un « petit nouveau » est également essentiel pour la construction psychique des ainés : elle les aide à acquérir par l’expérience la notion d’altérité, et leur apprend aussi de bonnes bases de relations inter-humaines…aidez-donc vos petits en favorisant la communication ! Le grand pédopsychiatre Marcel Rufo encourage ainsi les parents, plutôt que d’émettre un jugement moral négatif sur le comportement de leur enfant « c’est pas beau d’être jaloux ! », à faire exprimer les petits sur leur monde intérieur, sur les sentiments qui les habitent, sur leurs craintes. Si vos petits ne parlent pas directement, vous pouvez les aider par le dessin à manifester ce qui les habite, les craintes qu’ils vont manifester vous guideront pour mieux les aider à vivre cette étape cruciale dans leur développement.
Les éléments positifs de la jalousie : pour structurer la personnalité des frères et soeurs
Cette étape peut donc être cruciale et il est important pour les parents de faire le point, dans un premier temps, avec leur propre rapport à la jalousie… pour éviter de projeter leurs problématiques personnelles sur leurs enfants ! En effet, la jalousie fraternelle, incarnée par exemple dans l’histoire de Caïn et d’Abel, hante nos inconscients : c’est de cette jalousie meurtrière dont nous avons peur et que nous tentons de refouler. Les parents peuvent donc aller explorer cette crainte en eux, cette part d’ombre qui les habite, les enfants auront tout à y gagner !
Mais ce qui se passe au sein de la fratrie avec l’arrivée d’un petit dernier est d’un autre ordre. Les points positifs peuvent être nombreux, aux parents d’y être attentifs.
Premièrement, l’arrivée d’un autre permet la reconnaissance de ce que je suis. L’altérité permet à l’enfant de comprendre qu’il n’est pas le centre du monde…
L’enfant va également pouvoir grandir par cette étape, si vous l’encouragez à ne pas régresser, comme on observe souvent les petits qui refont pipi au lit, qui veulent de nouveau reprendre le biberon à l’arrivée du petit dernier ! Aimez-le tel qu’il est, à son âge, et n’ayez pas peur d’aimer différemment chacun puisque chacun est justement unique ! Rassurez votre enfant jaloux : il est unique, comme bébé est unique.
Pour les parents comme pour les enfants… cette période peut donc être riche de sens et de changements favorables à chacun, à condition de comprendre, d’exprimer et de ne pas refouler ce qui est en train de se passer !
Pour aller plus loin : Livres
Virgnia Satir, Thérapie du couple et de la famille, DDB.
Marcel Rufo, Frères et soeurs, une maladie d’amour, Poche 2003.