Les rappels du passé peuvent déclencher le souvenir des événements que l’on préférerait oublier. En utilisant l’IRMf, nous démontrons deux mécanismes neuronaux distincts qui favorisent l’oubli intentionnel de ces mémoires indésirables. Les deux mécanismes compromettent la rétention à long terme en limitant la prise de conscience momentanée des souvenirs, mais ils opèrent de manière opposée. Un mécanisme, la suppression directe, désengage la récupération épisodique par l’inhibition systémique du traitement de l’hippocampe qui provient du cortex préfrontal dorsolateral droit (PFC). Le mécanisme opposé, la substitution de la pensée, implique plutôt des processus de récupération pour occuper l’attention limitée de la conscience avec une mémoire de remplacement.
Ces résultats suggèrent que nous ne sommes pas à la merci de l’oubli passif ; Plutôt, nos souvenirs peuvent être façonnés par deux mécanismes opposés de contrôle mnémonique. Des chercheurs de Cambridge ont identifié, grâce à l’imagerie cérébrale, deux circuits différents utilisés par notre mémoire pour neutraliser les mauvais souvenirs.
Lorsque certains souvenirs indésirables remontent à la surface de la mémoire, nous sommes capables, dans une certaine mesure, de les chasser de notre esprit. L’oubli n’est donc pas seulement un mécanisme passif mais également un processus actif sur lequel il est possible d’exercer un certain contrôle. Ce qui se passe lorsque nous effaçons naturellement des souvenirs de notre mémoire intéresse beaucoup les neuroscientifiques car cela pourrait permettre de développer de nouvelles prise en charge après un traumatisme grave : agression, catastrophe, etc.
Effacement ou substitution
Roland Benoit et Michael Anderson, deux chercheurs du MRC Cognition and Brain Sciences Unit de Cambridge ont voulu en avoir le cœur net. Ils ont fait réaliser des exercices de répression de souvenirs à 40 volontaires tout en observant ce qui se passait dans leur cerveau grâce à des appareils d’IRM fonctionnelle. Pour réprimer les souvenirs, ils leur ont demandé d’utiliser deux méthodes différentes : la première, appelée « suppression directe », consiste à bloquer le souvenir désagréable (On ne veut pas y penser); la seconde, plus subtile, vise à remplacer le mauvais souvenir par un autre, meilleur, c’est la substitution. Deux méthodes déjà utilisées spontanément ou en traitements post-traumatiques.
Différences anatomiques
Benoit et Anderson se sont aperçus que les deux mécanismes activaient deux circuits différents dans le cerveau. Lorsque l’on bloque un souvenir, c’est bien une zone du cerveau en connexion directe avec l’hippocampe, une zone cruciale dans la mémoire, qui s’active, traduisant donc un effort d’effacement. En revanche, la stratégie de substitution se manifeste par une activation d’autres régions indiquant un travail de prise de conscience de souvenirs alternatifs. Il s’agit donc bien de deux processus différents, tout deux efficaces, mais dont une meilleure connaissance permettra peut-être une plus grande efficacité thérapeutique.