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Mutisme sélectif : Quand le silence de l’enfant devient alarmant

Votre enfant sait parler mais il ne le fait pas en public, à l’école ou avec des personnes étrangères? Vous le trouver trop timide ou trop têtu, désobéissant même ou impoli ? Ou peut-être parle-t-il à certaines personnes et pas à d’autres, aux enfants et pas aux adultes par exemple ou bien le contraire?

Le fait que l’enfant sache parler et qu’il semble sélectionner les situations dans lesquelles il refuse ou n’arrive pas à le faire, est symptomatique d’un trouble appelé mutisme sélectif.
Le mutisme sélectif est défini comme « une incapacité persistante à parler dans une ou plusieurs situations sociales (incluant souvent l’école), alors même que l’enfant est capable de comprendre le langage et de parler dans d’autres situations (comme à la maison) » (Gellman-Garçon, 2007).
L’enfant est donc capable de parler lorsqu’il se sent en confiance, à son aise et en sécurité mais il n’arrive pas à le faire dans des situations qui lui causent de l’anxiété.

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Les critères principaux décrits par le Manuel Diagnostique et Statistique des troubles mentaux (DSM IV) sont:
-Incapacité régulière à parler dans certaines situations sociales alors que l’enfant parle dans d’autres situations.
-Le trouble interfère avec la vie scolaire ou sociale
-Le trouble dure depuis au moins 1 mois (pas seulement le premier mois à l’école)
-L’incapacité à parler n’est pas liée à un défaut de connaissance ou de maniement de la langue
-L’incapacité à parler n’est pas expliquée par un trouble de la communication tel que le bégaiement ou d’autres troubles mentaux tels que l’autisme ou le syndrome d’Asperger.

Les enfants souffrants de mutisme sélectif peuvent et VEULENT parler. Cependant, le niveau d’anxiété est tellement élevé que les mots n’arrivent pas à sortir, ils sont comme coincés. C’est pourquoi ils ont besoin d’un environnement dénué de pression. Comment le leur procurer ?
Il importe tout d’abord de ne pas se focaliser sur leur incapacité de parler car ceci augmente leur niveau d’anxiété, ce qui ne fait qu’aggraver la situation.
Nathanson (2016), psychologue de l’enfant et spécialiste du mutisme sélectif, a décrit une liste des comportements à adopter au cours des interactions avec l’enfant atteint de mutisme sélectif. Cette liste comprend le fait de ne pas réprimander ou punir l’enfant lorsqu’il ne parle pas. En effet, ce dernier veut parler mais ne le peut pas, il ne le fait pas exprès et ne mérite donc aucun type de punition. La liste comprend aussi le fait de ne pas accorder trop d’attention à l’enfant, ne pas lui demander des questions directes, éviter de le regarder directement dans les yeux et enfin de ne pas se montrer surpris ou le récompenser directement lorsqu’il vous parle pour la première fois. Nathanson (2016) conseille de lui parler sans lui demander une réponse orale en retour mais de stimuler des réactions qui pourraient être orales. Par exemple, en faisant une activité avec l’enfant, l’adulte peut faire des commentaires erronés sur l’activité, ce qui donnera envie à l’enfant de le corriger.

Tout ceci permet de diminuer le niveau d’anxiété de l’enfant et de lui offrir un environnement qui lui permette de découvrir, à petits pas, que « parler » n’est pas aussi pétrifiant qu’il ne le pensait.
Un programme thérapeutique adapté, faisant intervenir la famille de même que le personnel éducatif entourant l’enfant, permet à ce dernier de dépasser son angoisse et de trouver sa voix.
« Je voulais leur parler depuis que je les ai rencontrés, je ne pouvais pas, maintenant que je le peux je me sens vraiment vraiment heureux ! » témoigne Robert, 9 ans, au cours du reportage « Help me to speak » (RDF Media, 2006).

Références:
Gellman-Garçon, E. (2007). Le mutisme sélectif chez l’enfant : un concept trans-nosographique: revue de la littérature et discussion psychopathologique. La psychiatrie de l’enfant. (50). 259-318. Doi: 10.3917/psye.501.0259.
Nathanson, L. (2016). How to interact with a child suffering from selective mutism. Primary times. October 2016. En
American Psychiatric Association. (2001). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders. 4th edition revised (DSM IV-TR). Washington DC: American Psychiatric Association.
Dawson, J. (2006). Help me to speak. United Kingdom: RDF Media.